Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1805, tome 12.djvu/553

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plus efficacement, qu’on peut sans regret abandonner l’espérance de le faire réduire à l’état panaire.

Il se consomme, en Europe, beaucoup de riz sous forme de potages et de gâteaux ; mais son usage est d’une toute autre importance chez les Orientaux ; ils sont amateurs d’un mets fort sain et très-économique, connu sous le nom de pilaw ; ce mets leur est aussi nécessaire que le macaroni aux Bergamasques, et la polenta aux Napolitains et aux Vénitiens. Ce n’est autre chose que du riz renflé par un bouillon quelconque, préparé ensuite au gras et au maigre, selon le coût et les facultés du consommateur. Tantôt le pilaw tient lieu de soupe, d’autres fois d’entrée, quelquefois ou le sert comme entre-mets. Voici la recette la plus généralement usitée à Constantinople.

On prend un poulet, on le coupe en quatre ou cinq parties ; on le fait revenir un moment dans une casserole, ensuite on y met du bouillon d’un autre poulet, le double de la quantité du riz qu’on se propose d’y ajouter. Aussitôt qu’il commence à bouillir, on y met le riz, qui devra avoir été préalablement lavé trois fois ; on le remue, afin qu’il ne s’attache pas au fond ; il faut faire en sorte que la casserole soit la plus large possible ; aussitôt que le riz a absorbe la totalité du bouillon, on le retire, et on met, dans une autre casserole, du beurre fondu, dont la quantité est plus ou moins considérable, suivant le goût du consommateur. On le fait roussir et on le jette sur le pilaw. Il faut avoir la précaution de remuer le tout, afin que le beurre se distribue uniformément. On le couvre et on le sert après cinq à six minutes sur la table.

Au lieu de poulet, on se sert de la viande de boucherie, comme de mouton découpé par petits morceaux, pour faire le pilaw. Il y entre souvent des pigeons et des cailles.

On emploie également le riz pour nourrir la volaille, avec lequel elle engraisse parfaitement ; il fournit à la fermentation et à la distillation une liqueur spiritueuse appelée arack.

Quand le riz étoit à bon compte, il servoit de base à des potages qui portoient son nom. On n’a pas encore oublié les avantages qu’ont procurés aux pauvres les distributions de riz économique par les anciens curés des paroisses de Saint-Roch et de Sainte-Marguerite ; les noms de ces pasteurs zélés sont inscrits à jamais dans les annales de la bienfaisance. Mais ces riz étoient plutôt une bouillie qu’une soupe ; et, sous la première forme, les farineux plus concentrés et moins délayés, présentent une masse que les sucs digestifs ne peuvent que difficilement pénétrer, dissoudre et changer en notre propre substance. Qu’arrive-t-il ? Elles séjournent peu dans l’estomac, et sont, pour ainsi dire, précipitées par leur poids dans les entrailles, ce qui fait que l’appétit renaît bientôt avec plus d’énergie qu’auparavant. D’après ces observations, il convient de rendre cette préparation moins épaisse, de la rapprocher davantage de l’état de soupe ou de potage. On voit au mot Orge combien ces soupes, préparées en grand, peuvent seconder la bienfaisance, soulager les indigens, et diminuer en même temps la consommation du pain.

Le riz a souvent servi de base à ces poudres nutritives, à ces bouillons portatifs, proposés comme des secours utiles pour les temps de disette et dans les voyages de long cours.

Mais si, d’après l’observation de plusieurs auteurs de réputation, l’homme a besoin de trouver, dans la nourriture du volume qui remplisse la grande capacité de son estomac, serve à en distendre les parois, et agisse, par son poids, en manière de lest, de quel œil peut-