Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1805, tome 12.djvu/552

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

rhubarbe de France a les mêmes propriétés médicales que l’étrangère.

Cette plante peut donc être admise encore au nombre de celles propres au sol de la France ; la possibilité de sa culture parmi nous n’est plus maintenant un problème : essayée dans plusieurs cantons, depuis une vingtaine d’années, elle a réussi au point de fournir assez de racines pour marquer dans le commerce de la droguerie ; et on s’est assuré, par une suite d’expériences, dans les hôpitaux militaires, qu’elle avoit à peu près les mêmes propriétés en en doublant la dose.

Le rheum ribes, si célèbre parmi les Arabes, peut encore être cultivé en France, en pleine terre, dans nos cantons du Nord. Cette plante vient sur les hautes montagnes, couvertes de neige une partie de l’année. Deux des individus qu’on possède au Muséum n’ont été abrités, pendant l’hiver, que par une couverture de fumier, et ils n’ont pas paru sensibles au froid : on les cultive en pleine terre où ils ont pris beaucoup d’accroissement. Il paroît même que la culture du ribes n’exige pas grande précaution ; il reste long-temps sans fleurir, parce qu’il faut que la racine, qui est vivace et qui devient très-volumineuse avec les années, puisse se développer assez pour pousser des tiges à fleurs. Cette plante mérite donc d’être encore répandue en France, et si on y parvient, comme on a tout lieu de l’espérer, c’est un nouveau service dont on sera redevable aux soins de M. Thouin, et qu’on pourra mettre au nombre de ceux que le Muséum a rendus à la médecine, aux arts et à l’économie rurale, depuis l’époque de sa fondation.

Nous ne pouvons cependant taire ici qu’une plante qui occupe la terre pendant cinq années environ, et dont chaque pied exige un grand espace, à cause de sa végétation considérable, et de la nécessité de faire prendre à la racine tout le volume qu’elle doit acquérir, ne présentera jamais les mêmes avantages pour la teinture, que des végétaux annuels ; et, en supposant que les essais qu’on en a faits aient prouvé que la rhubarbe fournit un bon teint, la matière colorante jaune est trop commune dans la nature, pour que sa racine puisse être considérée comme une ressource en ce genre. D’un autre côté, la rhubarbe si usitée autrefois en médecine, a perdu tellement aujourd’hui de sa vogue, (car les médicamens sont aussi soumis à l’empire de la mode,) que sa consommation en est extrêmement restreinte. Ces observations ne sauroient diminuer les obligations que nous devons à M. Delunel, secrétaire de la Société de Pharmacie de Paris, qui n’a rien oublié pour propager sur le sol de la France les différentes rhubarbes, et à M. Gentou qui en a planté quinze à vingt mille pieds, et dont le produit annuel est de trois à quatre millions pesant de racines. Assurément, c’est bien mériter de son pays, que d’y accréditer de nouvelles cultures par des conseils et la leçon de l’exemple. (Parm.)


RIZ. Nous ajouterons à ce que dit Rozier, sur les usages, économiques de ce grain, que l’impossibilité de séparer de sa farine un atome de gluten, analogue à celui du froment, explique le défaut de succès des tentatives essayées jusqu’à présent pour la transformer en pain : c’est donc une chimère, une véritable manie, que de s’obstinera vouloir la soumettre à cette forme, puisque mêlée en nature, ou cuite en diverses proportions avec la farine la plus propre à la boulangerie, le pain qui en résulte est compacte, fade, indigeste, et susceptible de durcir en peu de temps. Tous ceux qui ont prétendu le contraire prouvent qu’ils ne connoissent nullement la théorie de la panification ; qu’ils ignorent que, dans toutes les contrées où l’usage du pain est inconnu et où le riz en tient lieu, on se borne à déterminer le ramollissement et le gonflement de ce grain en l’exposant à la vapeur de l’eau bouillante, et à le manger sous cette forme concurremment avec les autres mets qui composent le repas de tous les jours. Il y a tant de moyens d’employer ce grain