Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1805, tome 12.djvu/668

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doigts ; ce sont des vices de conformation ; et les chiens dans lesquels on les trouve sont sujets à s’écarter de la voie du gibier. Ceux dont les jambes sont courtes, les pieds mous et plats, et les épaules charnues, n’ont ni vigueur ni légèreté, non plus que ceux dont les épaules sont sèches et serrées, les reins et les jarrets bas, et les cuisses longues et plates. Les chiens qui ont le fouet attaché fort haut, et retombant sur le dos en se tournant en trompe, ne sont jamais vigoureux ; ceux qui ont le poitrail trop ouvert sont sujets à se prendre des épaules. Des oreilles épaisses indiquent pour l’ordinaire un chien pesant, et elles se déchirent si elles sont trop minces.

Il y a plusieurs races de chiens courans ; mais comme elles ont été mêlées par de nombreux croisemens, il est rare de les rencontrer dans leur pureté. On a également mélangé les chiens anglais avec ceux de France, et il en est résulté plusieurs variétés plus ou moins estimées. La plus grande et la plus belle race de l’Angleterre, que l’on y nomme race royale, a des taches noires sur un fond blanc : ce sont les meilleurs chiens de l’Europe.

Il faut encore qu’un chien courant soit bien allant, bien gorgé, ni trop chaud, ni trop froid de gueule, bien collé à la voie ; qu’il ne bricole pas, ne crie pas à faux et ne cèle pas la voie ; enfin qu’il soit sage et obéissant. Pour qu’une meute soit belle dans son ensemble, les chiens qui la composent doivent être de même taille et de même pied, c’est-à-dire de la même vitesse.

Indépendamment de la race de chiens courans, proprement dite, la vénerie se sert encore de bassets à jambes droites et à jambes torses, de grands lévriers et même de mâtins. (Voyez la description de ces différentes races, à l’article Chien, du Cours.)

Lorsqu’on dresse les chiens pour la chasse de plaine, on s’étudie à contrarier l’instinct naturel de ces animaux qui les porte à poursuivre le gibier et à se jeter dessus. Il faut que le chien d’arrêt dépose toute volonté, pour ne plus obéir qu’à celle de son maître et au moindre signe de son commandement. L’industrie de l’homme a moins altéré la nature du chien courant ; il peut se livrer à l’impulsion de son instinct qui le porte sur les traces de l’animal sauvage. Le chasseur exige cependant que l’impétuosité de son chien soit modérée, et que ses mouvemens soient soumis à des règles dont il ne permet pas qu’il s’écarte. Cet état de demi-liberté et de demi-contrainte est le fruit de l’exercice et de l’éducation.

Les chiens courans de bonne race chassent quelquefois d’eux-mêmes, comme il y a des chiens de plaine qui arrêtent naturellement. C’est ordinairement à dix mois ou à un an que l’on retire les jeunes chiens des lieux où ils ont été élevés, et que doit commencer leur éducation. Celui qui en est chargé a besoin de patience, de douceur et d’intelligence ; les mauvais traitemens que la brutalité de la plupart des piqueurs fait éprouver aux chiens, rebutent ces animaux et empêchent le développement de leurs bonnes qualités. Les détails indispensables pour bien dresser les chiens courans me mèneroient trop loin ; les particuliers feront mieux d’acheter leurs chiens tout dressés, que de se donner la peine d’entreprendre eux-mêmes cette éducation. Si néanmoins ils vouloient se livrer à une occupation qui exige du temps et de la patience, ils ne pourroient mieux faire que de suivre les instructions que M. Desgraviers, ancien commandant des véneries du prince de Conti, a présentées dans son excellent ouvrage intitulé : Essai de Vénerie, seconde édition. Paris, Délerville, 1804, page 96.

Il est essentiel de loger les chiens courans dans un chenil commode et proportionné à leur nombre. En été, ce chenil doit être exposé au levant et avoir plusieurs fenêtres grillées qui s’ouvrent de plusieurs côtés, afin que l’air puisse circuler. Le chenil d’hiver sera à l’exposition du midi et n’aura qu’une fenêtre. Quand on le pourra, on fera bien d’y établir un poêle entouré d’un grillage, et que l’on allumera quand les chiens reviendront de la chasse fatigués ou mouillés. S’il n’y a qu’un chenil, il sera au levant et au couchant. Mais, quelque part qu’on tienne les chiens, la plus grande propreté doit y régner ; on nettoie et on lave souvent