Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1805, tome 12.djvu/677

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Quand le sanglier tient aux abois, il est bon d’empêcher les chiens d’en approcher de trop près ; les piqueurs entrent dans le fort avec précaution, l’un d’eux met pied à terre et perce l’animal avec son couteau de chasse, au défaut de l’épaule ; mais il doit s’esquiver à l’instant, en se jetant du côté opposé à la blessure. Si cependant le sanglier est furieux, au point d’exposer la vie des veneurs, des chiens ou des chevaux, il est à propos de le tuer d’un coup de carabine ou de pistolet.

Dès qu’il est tué, les chasseurs ont grand soin de lui couper les suites, dont l’odeur est si forte, que si l’on passe seulement quelques heures sans les ôter, toute la chair en est infectée. Les chiens ne mangent pas la chair du sanglier avec autant d’avidité que celle du cerf ; on se contente de leur donner à la curée les épaules et les dedans. Avant de quitter le lieu de la chasse, on visite les chiens, et l’on panse ceux qui ont été blessés par le sanglier.

Une manière plus courte et plus sûre pour prendre les sangliers, c’est de les coiffer avec des dogues et de forts levriers d’Angleterre, que l’on nomme levriers d’attache. On lâche ces chiens à la suite d’un sanglier qui débuche et prend la plaine pour passer d’un bois à un autre ; ils le joignent bientôt et le prennent par l’oreille ou le jarret, ce qui donne aux piqueurs le temps d’arriver, car ces chiens ne démordent pas, et on tue facilement le sanglier.

On prend aussi les sangliers dans les toiles. L’équipage de cette chasse s’appeloit le vautrait dans la vénerie du roi.

De la chasse du loup. La chasse du loup aux chiens courans est la moins utile de toutes les chasses que l’on peut faire à cet animal destructeur. Il est des moyens plus sûrs de purger l’agriculture d’un ennemi dangereux et redouté, tels que les battues, les pièges, etc. (Voyez l’article Loup, du Cours.) Ce n’est pas que la louveterie, créée par Henri IV, et montée comme elle l’étoit à Versailles, ne rendît aussi des services par la destruction des loups ; mais aucun particulier ne pouvant se procurer un équipage semblable à celui qui existoit dans la vénerie du roi, ce seroit chose superflue, inconvenante même pour un ouvrage consacré aux habitans des campagnes, que de les engager à tâcher d’imiter un établissement très-dispendieux, et qui n’atteindroit pas au but vers lequel leur intérêt doit les diriger, l’extermination des loups. La chasse ne présente plus d’amusement, dès que l’on a la certitude que si on manque l’animal qui en fait l’objet, il deviendra un fléau pour le pays où on l’aura laissé, ou dans lequel on aura amené un si funeste présent.

De la chasse du renard. De toutes les chasses aux chiens courans, celle du renard est la plus agréable ; elle se fait d’ailleurs à peu de frais. Tous les chiens chassent le renard volontiers, et même avec plaisir ; car, quoiqu’il ait l’odeur très-forte, ils le préfèrent souvent au cerf, au chevreuil et au lièvre. Cette odeur procure encore l’avantage de suivre la chasse sans qu’il y ait de défaut.

La façon la plus ordinaire et la plus amusante de chasser le renard, est de commencer par boucher les terriers. Cette opération se fait communément pendant la nuit qui précède la chasse : le matin on va quêter le renard avec les chiens de meute, car on ne le détourne pas. Dès qu’ils sont tombés sur la voie, le renard gagne son gîte ; mais le trouvant bouché, il retourne dans le bois ; et après s’être fait chasser, il revient encore au terrier, puis il prend le parti de se faire battre, et quelquefois il fait une fuite très longue. Il ne laisse pas de fatiguer beaucoup les chiens, parce qu’il passe à dessein dans les endroits les plus fourrés, où les chiens ont grand’peine à le suivre, et que, quand il prend la plaine, il va très-loin sans s’arrêter. Il tient aussi long-temps, et quelquefois plus long-temps que le cerf ; il est à propos d’avoir des relais, ou du moins de ne faire partir qu’un petit nombre de chiens à la fois, en commençant par les plus vigoureux.

Lorsque le renard tire sur ses fins, il se réfugie dans un trou, sous une pierre, ou sous une petite île au milieu de l’eau ; il cherche à s’y défendre, mais les chiens s’élancent sur lui et l’étranglent.

Si l’on ne veut pas forcer le renard, ce qui est toujours long, des tireurs se placent