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que la nature du terrain le permettra. Alors on espacera les ormes de vingt à vingt-quatre pieds, et entre chacun on plantera un saule. Les ormes, dans la suite, feront périr les saules ; mais, avant cette époque, on en pourra retirer quatre, cinq, et jusqu’à six tontures.

Si le terrain à planter est de nature à n’admettre que des frênes, on y espacera les arbres de quinze à dix-huit pieds. Il en seroit de même pour les platanes.

Si ce sont des ypréaux ou des trembles, on les espacera de douze à quinze pieds, sans mélange d’autre essence de bois.

Si ce sont des châtaigniers ou des noyers, on les espacera comme les chênes, mais sans mélange d’autre essence, afin de ne pas nuire au développement de leurs têtes.

Si ce terrain convient également à la culture du noyer et du châtaignier, ou pourra y planter alternativement un noyer et un châtaignier, en observant le même espacement que pour les chênes.

Lorsqu’on plante des arbres dans des terrains dont la couche végétale a beaucoup d’épaisseur, les espacemens que nous venons d’indiquer peuvent être diminués. Les chênes et les hêtres y seront espacés de quinze à vingt pieds, lorsqu’ils seront sans mélange d’aucune autre essence, ou de vingt-deux à vingt-cinq pieds, avec un frêne ou un platane entre deux. Les ormes sans mélange y seront espacés de quinze à dix-huit pieds ; et les ypréaux, les trembles et les peupliers, à dix ou douze pieds

Il faut observer à cet égard que, pour les frênes, les platanes, les ypréaux, les trembles et les peupliers, un sol de dix-huit pouces d’épaisseur est un sol profond, tandis qu’il n’est qu’un terrain de qualité médiocre pour les meilleures essences.

§. III. Formation de la tige des arbres plantés isolément. Lorsque les arbres sont en massif, ils s’élèvent naturellement, et acquièrent de belles tiges sans le secours de l’art, si d’ailleurs ils croissent dans un terrain de qualité convenable ; mais il n’en est pas ainsi des arbres plantés isolément. À quelques exceptions près, ils deviendroient tous pommiers, si on abandonnoit à la nature le soin de former leur tige. Dans cet état, leur plantation n’est pas aussi avantageuse que lorsqu’on sait leur procurer de belles tiges.

Voici les procédés que nous employons, à cet effet, dans nos plantations personnelles, et nous affirmons qu’il nous ont toujours complètement réussi.

Dans la première année de leur plantation, les arbres isolés poussent beaucoup de bourgeons le long de leur tige. Si on laissoit croître ces bourgeons, ils se partageroient la sève de ces arbres, et ils n’offriroient que des buissons. Il faut donc les ébourgeonner soigneusement, tous les deux mois, pendant cette première année, afin de forcer la sève de s’élever en abondance dans la partie supérieure de leur tige, et d’y pousser des branches vigoureuses. Cet ébourgeonnement se fera tout le long de la tige de chaque arbre, en commençant par le bas, et en remontant jusqu’à un pied de son extrémité. Les bourgeons qui pousseront dans cette partie sont destinés à former la tête de l’arbre, et on les conservera intacts jusqu’au mois d’août. À cette époque, on ne conservera que les quatre bourgeons les plus forts de cette partie, et on retranchera le surplus.

Après cette opération, on choisira, parmi ces bourgeons conservés, la branche la plus verticale et la plus vigoureuse. On la conservera intacte, comme étant destinée à prolonger la tige de l’arbre, et à être identifiée avec elle. Ensuite, on écourtera légèrement les trois autres branches, afin de diriger