Page:Ruskin - La Bible d’Amiens.djvu/111

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5. Laissant maintenant l’intelligent voyageur aller remplir son vœu de pèlerinage à Paris — ou n’importe où un autre Dieu peut l’envoyer — je supposerai que un ou deux intelligents garçons d’Éton, ou une jeune Anglaise pensante, peuvent avoir le désir de venir tranquillement avec moi jusqu’à cet endroit d’où l’on domine la ville, et de réfléchir à ce que l’édifice inutilitaire, — dirons-nous aussi inutile ? — et son minaret sans fumée peuvent peut-être signifier.

Je l’ai appelé minaret, faute d’un meilleur mot anglais. Flèche — arrow — est son nom exact ; s’évanouissant dans l’air vous ne savez à quel moment par sa simple finesse. Elle ne jette pas de flamme, elle ne produit pas de mouvement, elle ne fait pas de mal, la belle flèche[1] ; sans panache, sans poison et sans barbillons ; sans but, dirons-nous aussi, lecteurs vieux et jeunes, de passage ou domiciliés ? Elle et l’édifice d’où elle s’élève, qu’ont-ils signifié un jour ? Quelle signification gardent-ils encore en eux-mêmes pour vous ou pour les habitants d’alentour qui ne lèvent jamais les yeux sur eux, quand ils passent auprès ?

Si nous nous mettions d’abord à apprendre comment ils sont venus là.

6. À la naissance du Christ, tout le flanc de colline et au bas la plaine brillante de cours d’eau avec les champs jaunes de blé qui la dominent, étaient habités par une race enseignée par les Druides, de pensées et de mœurs assez farouches, mais placée sous le gouvernement de Rome et s’accoutumant graduellement à entendre les noms et dans une certaine mesure à confes-

  1. Cf. la description de la tour de l’église de Calais (Modern Painters, V, i, § 2 et 3.) — (Note du Traducteur.)