Page:Ruskin - Les Lys du jardin de la reine.djvu/30

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nul danger, nulle tentation, nulle cause d’erreur ou de faute ne pénétrera.

À ceci l’on reconnaît le vrai foyer : il est le lieu de la paix. On y est à l’abri, non seulement du mal, mais de la frayeur, du doute ou des divisions. — S’il n’est point tout cela, il n’est point « le foyer ». Si les anxiétés de la vie extérieure pénètrent dans son cercle, si les indifférents, les inconnus, ceux dont le cœur est léger ou l’esprit hostile, passent son seuil, avec la permission du mari ou de la femme, il cesse d’être le foyer. Il n’est plus alors qu’une portion de ce monde extérieur au-dessus de laquelle vous avez bâti un toit, et au dedans de laquelle vous avez allumé un feu. Mais s’il demeure un lieu sacré, un temple de Vesta, sur qui veillent les dieux hospitaliers devant la face desquels nul ne paraîtra qui ne peut être accueilli avec amour ; s’il est ce toit et ce feu (emblèmes eux-mêmes d’une autre ombre et d’une autre lumière plus nobles : l’ombre du roc sur une terre aride, la lumière du phare sur une mer soulevée), s’il est vraiment tout cela, alors il justifie et mérite le glorieux nom de foyer.

Et partout où arrive une vraie femme, ce foyer l’entoure toujours. Les étoiles peuvent être seules au-dessus de sa tête ; le ver luisant dans l’herbe humide de la nuit, le seul feu à ses pieds ; mais le foyer est là, partout avec elle. Et si la femme est noble, il s’étend au loin autour d’elle, mieux que si le toit en était fait de cèdre ou peint en vermillon, répandant sa douce lumière au loin pour ceux qui, autrement, seraient sans foyer.