Page:Ruskin et la religion de la beauté.djvu/242

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comme premier principe que notre art plastique, peinture ou sculpture, doit ressembler le plus possible à la Nature.

§ 2.

Mais la Nature vue comment ? Avec les yeux ou avec les rayons Rœntgen ? La Nature touchée comment ? Avec la main ou avec le scalpel ? La Nature observée comment ? Contemplativement, en des années, comme l’observe le solitaire de l’Athos ou des Alpes, ou bien chronophotographiquement, en un deux millième de seconde, comme l’étudie un disciple de M. Muybridge ou de M. Marey, qui apparaît, photographie et disparaît par l’express suivant ? Il faut distinguer entre ces choses, car les mots sont si complaisants en esthétique et le vocabulaire si mal défini, qu’en disant qu’on doit serrer de près la Nature, on s’expose à être pris pour un photographe, pour un anatomiste,pour un géologue ou pour un scaphandrier. Or aucun de ces hommes n’a vu ni n’est près de voir esthétiquement la Nature, pas plus que le pompier, logé dans les coulisses, n’a une idée de l’effet d’un opéra. Il aperçoit de face les choses qu’il faudrait voir de profil, et assourdi par une seule partie ne saurait saisir un ensemble. Il ne verra quelque chose que le jour où le théâtre brûlera. Nous aurons besoin de lui alors, et mieux