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Page:Ruskin et la religion de la beauté.djvu/252

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jours exactes, des anciens régimes politiques du royaume des montagnes auxquelles ces marbres ont appartenu, — de ses infirmités et de ses énergies, de ses convulsions et de ses consolidations, depuis le commencement des temps.

Prenons donc ces matériaux, et couvrons-en nos demeures ! Quand on l’a fait, on a fait les chefs-d’œuvre de l’architecture. On a fait les cathédrales gothiques, les portails peints, les bois ouvragés et coloriés, les tympans dorés comme des couchers de soleil. La vénitienne, où tout était naturel et couvert de peintures riches comme des feuilles d’automne, fut l’apogée. La Renaissance, avec ses palais gris et ses tympans géométriques, sa science froide, précise et pompeuse, fut l’hiver, — « l’hiver qui fut sans chaleur comme il était sans couleur ! » Du jour où l’architecte oublia la Nature multiforme et multicolore il oublia la Beauté. « La décadence et la dégradation dès le XVe siècle ne furent pas dues à son naturalisme, à sa fidélité d’imitation, mais à l’imitation de choses laides, c’est-à-dire non naturelles. Tant que le naturalisme se divertit à sculpter des animaux et des fleurs, il resta noble. Mais du jour où l’on y associa des objets artificiels, tels que des armures, des instruments de musique, des cartouches, des rouleaux sans signification et des boucliers bombés, et