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Page:Ruskin et la religion de la beauté.djvu/264

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gistes français du milieu du siècle, qui « semblent regarder la Nature dans un miroir noir ! » Il faut assombrir chaque teinte, non avec un mélange de couleur sombre, mais avec sa propre teinte simplement renforcée. Ne nous parlez pas non plus de rien affaiblir, sous prétexte de « perspective aérienne » ! Il n’y a pas de couleur particulière pour exprimer la distance. Il est faux que parce qu’un objet est loin, il doive être moins coloré que s’il était près.

L’orange vif dans une orange est, il est vrai, signe de proximité, car si vous éloignez beaucoup cette orange, elle ne paraîtra plus si brillante, mais l’orange vif dans le ciel est signe de distance, parce que vous ne pouvez voir un nuage orangé près de vous. Le vert d’un lac suisse est pâle dans les vagues claires, sur le bord, mais intense comme l’émeraude à six milles du bord. Il est absurde d’attendre quelque secours des lois de la perspective aérienne. Il faut observer les effets de la Nature et les reproduire aussi fidèlement et aussi complètement que possible, et ne jamais altérer une couleur parce qu’elle ne paraît pas être à sa place voulue..... Pourquoi supposer que la Nature veut que vous sachiez toujours exactement à quelle distance une chose est d’une autre ? Certainement elle entend que vous preniez toujours plaisir à son coloris, mais elle ne désire point que vous mesuriez toujours l’espace. Comment feriez-vous si, chaque fois que vous peignez un soleil couchant, il vous fallait exprimer ses 95 000 000 de milles dé distance en perspective aérienne ?