Aller au contenu

Page:Ruskin et la religion de la beauté.djvu/286

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

son harmonie et non dans notre agencement ; l’aimer pour elle et non pour nous et, s’il le faut, nous adonner à la plus humble besogne manuelle pour la rendre mieux et la faire admirer davantage, — tout l’Art est là. Ensuite, pas de règles, pas de recettes, liberté entière et à Dieu vat !

Allez sur le devant de la vieille cathédrale où si souvent vous avez souri de l’ignorance fantastique des anciens sculpteurs ; examinez une fois de plus ces laids diablotins, ces monstres informes et ces statues renfrognées, sans anatomie, et rigides, mais ne vous moquez pas d’elles, car elles sont les signes de la vie et de la liberté de chaque ouvrier qui frappa la pierre : une liberté de penser et un rang dans l’échelle des êtres tels qu’aucune loi, ni aucune charte, ni aucune œuvre de bonne philanthropie ne peuvent les assurer, mais tels que ce devrait être le premier but de toute l’Europe aujourd’hui de les recouvrer pour ses enfants !

L’Art vit de l’adoration envers la Nature, mais il meurt de la servitude envers les hommes. « La seule doctrine qui me soit propre, dit Ruskin dans Saint-Mark’s Rest, est l’horreur de ce qui est doctrinaire au lieu d’être expérimental et de ce qui est systématique au lieu d’être utile. Aussi aucun de mes vrais disciples ne sera jamais un ruskinien. Il suivra non ma direction, mais les sentiments de son âme propre et l’impulsion de son Créateur. » D’ailleurs, « les arts, en ce qui concerne leur enseignement, diffèrent des sciences en ce que leur