Page:Ruskin et la religion de la beauté.djvu/40

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ches d’arbres profilées sur le ciel bleu ne bougeaient pas plus que les branches d’un arbre de Jessé sur un vitrail. » Il comprit toutefois qu’il ne mourrait pas encore ce jour-là et commença à dessiner avec soin un petit tremble qui était de l’autre côté de la route. Il trouvait, d’ailleurs, que rien à Fontainebleau ne valait la peine d’être vu. Les hideous rocks d’Evelyn ne lui paraissaient jamais assez hideux pour l’émouvoir et tout au plus bons à emporter dans sa poche, s’ils avaient valu le transport.

Et aujourd’hui, j’avais oublié les rochers, le palais et la fontaine, tout ensemble, et je me trouvais gisant sur le bord d’une route, dans le sable et sans autre point de vue que ce petit tremble contre le ciel bleu... Languissamment, mais sans paresse, je commençai à le dessiner et, comme je dessinais, ma langueur passait. De belles lignes étaient tracées sans fatigue. Elles devenaient de plus en plus belles à mesure que chacune sortait du reste et prenait sa place dans l’air. Avec une admiration croissante, à chaque instant, je vis qu’elles se composaient d’elles-mêmes d’après des lois plus belles qu’aucune de celles que connaissent les hommes. À la fin, l’arbre était là, et tout ce que j’avais pensé auparavant sur les arbres n’était plus...

Comme toutes les passions, si cet amour de la nature remplit sa vie de grandes joies, elle y ajouta aussi des tristesses inconnues à d’autres âmes. S’il n’a plus pour encadrer son horizon les corolles