Page:Russell - Le Mysticisme et la Logique.djvu/54

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l’humilité et de fécond dans le tempérament scientifique.

Sans doute les êtres humains ne peuvent-ils pas entièrement dépasser la nature humaine ; quelque chose de subjectif, ne serait-ce que l’intérêt qui détermine le sens de notre attention, doit demeurer au fond de toute notre pensée. Mais la philosophie scientifique est plus proche de l’objectivité que toute autre recherche humaine, et nous met ainsi en rapport avec le monde extérieur de la façon la plus étroite, la plus ferme, et la plus intime qui soit possible. Pour un esprit primitif, tout ce qui existe est ou bienveillant ou hostile ; mais l’expérience a montré que la bienveillance et l’hostilité ne sont pas des conceptions qui permettent de comprendre le monde. La philosophie scientifique représente donc, quoiqu’encore à l’état naissant, un mode de pensée plus élevée que toute croyance et que toute rêverie pré-scientifique ; et, comme tout ce qui tend à se dépasser, elle contribue dans une grande mesure au développement de son domaine, de sa largeur d’esprit et de sa compréhension. L’évolutionnisme a beau se fonder sur des faits scientifiques particuliers, il ne réussit pas à être une philosophie véritablement scientifique, à cause de sa dépendance à l’égard du temps, de ses préoccupations morales et de l’intérêt considérable qu’il prend aux agissements et aux destinées de ce monde. Une