Page:Russell - Le Mysticisme et la Logique.djvu/64

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sentent. C’est qu’en algèbre l’esprit apprend, pour la première fois, à envisager des vérités générales, des vérités que l’on affirme non seulement d’un objet déterminé, mais d’un objet quelconque pris dans un groupe. C’est à cette faculté de comprendre et de découvrir des vérités de ce genre qu’est due la maîtrise de l’intellect sur le domaine entier des choses actuelles et possibles ; et c’est cette capacité de manier le général comme tel qui devrait être un fruit de l’éducation mathématique. Mais le plus souvent, qu’un professeur d’algèbre est peu capable d’expliquer l’abîme qui sépare l’algèbre de l’arithmétique, et que l’élève est peu secondé dans ses efforts pour le comprendre ! D’ordinaire, on poursuit la méthode adoptée en arithmétique ; on expose des règles sans expliquer adéquatement leur raison d’être ; l’élève apprend à s’en servir en aveugle, et bientôt lorsqu’il réussit à obtenir la solution que le maître demande, il a le sentiment d’avoir surmonté les difficultés du sujet. Mais, de la compréhension profonde des méthodes employées, il n’a, probablement, presque rien acquis.

Lorsqu’on a appris l’Algèbre, tout va son train jusqu’à ce que l’on arrive aux études où l’on use de la notion d’infini — le calcul infinitésimal et l’ensemble des mathématiques supérieures. La solution des difficultés qui entouraient auparavant l’infini mathématique est