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LES ORDRES DE PARIS.

Si font savoir lor pénitance.
Li autre par fauce samblance
Sont signeur de Paris en France ;
Si ont jà la cité pourprise.
Diex gart Paris de meschéance
Et la gart de fauce créance,
Qu’ele n’a garde d’estre prise !

Li Barré[1] sont près des Béguines :
Xxix.[2] en ont à lor voisines
(Ne lor faut que passer la porte),
Que par auctorités devines,
Par essamples et par doctrines
Que li uns d’aus à l’autre porte,

    Jacobins, p. 177, et, dans le 1er volume du nouveau recueil de Méon, faisant suite à son édition revue et augmentée des Fabliaux de Barbazan, Le Dis de la vescie à prestre.)

  1. Ancien mon donné aux Carmes, parce que leurs habits étaient divisés par bandes blanches et noires, ou barres transversales. J’ajouterai que ces religieux tirent leur premier nom d’un monastère considérable qui existait sur le Mont-Carmel. Ils furent établis en France par saint Louis, en 1254, au retour de son premier voyage en Terre-Sainte, ainsi que le prouve une lettre de Philippe de-Bel de l’an 1322, à laquelle on pourra désormais ajouter les vers de Rutebeuf, Les Barrés demeurèrent d’abord à l’endroit qui fut nommé plus tard les Célestins, et qui est aujourd’hui une caserne. C’était alors un lieu fort étroit, avec une église fort basse, un cimetière et quelques petits jardins. Ils en sortirent au bout de 58 ans, après avoir démontré à Philippe-le-Long qu’ils étaient trop loin de l’Université, dont ils ne pouvaient suivre les leçons, et que chaque hiver leur communauté, qui était située sur le bord de la rivière, courait risque d’être emportée par les eaux. Ils furent transportés à la place Maubert ; mais jusque-là, selon la maligne expression de Rutebeuf, on put dire d’eux : Li Barré sont près des Béguines, car ces religieuses demeuraient alors à côté d’eux, dans l’endroit qui en 1461 fut nommé l’Ave-Maria, et dans lequel la reine Charlotte, deuxième femme de Louis XI, introduisit le tiers ordre de Saint-François.
  2. Ms. 7615. Var. Lxx.