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XLII

Je suis riche. J’ai hérité d’un parent que je ne me connaissais même pas. La fée m’a tenu parole.

J’ai fui la sottise administrative. J’ai donné ma démission.

J’ai fait bâtir une maison à Chambrancon, pour habiter près de ma fourmilière, pour vivre le plus possible en regardant mes amies que je ne reconnais plus parmi l’innombrable population nouvelle.

C’est ma seule joie.

Ma vie humaine est très malheureuse. J’aime ma femme aussi haineusement que j’aimais la fourmi Marie. J’ai des jalousies furieuses que je ne puis dire. Elle me répète souvent :

— Tu as été parfait pendant un an. Mais depuis le jour où tu t’es coupé la main et où tu as eu, tout d’un coup, sans que je puisse deviner pourquoi, tant de cheveux blancs, tu es pire qu’autrefois.

Et, avec des caresses qui m’irritent, elle supplie :

— Redeviens donc le délicieux Octave de cette année où nous fûmes si heureux.