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VIII

Au cours du précédent chapitre, je me suis un peu étonné de ma hardiesse dans l’emploi de l’analogie. Vingt fois déjà j’aurais dû des excuses au lecteurs pour de tels involontaires et inévitables mensonges. Quand j’essaie de dire avec des paroles d’homme des pensées et des expressions de fourmi, il est bien évident que mes traductions sont d’éhontées trahisons.

Traduire exactement en une langue humaine ce qui a été pensé et dit en une autre langue humaine est presque toujours impossible. Et pourtant quelle parenté étroite rapproche des paroles exprimées par les mêmes organes, des pensées créées par des cerveaux semblables ! il ne peut au contraire y avoir, entre des cerveaux aussi différents que celui de l’homme et celui de la fourmi, entre des langages aussi divers que la parole articulée et le mouvement des antennes, qu’hostilité et mutuelle incompréhension.

Sans doute, quoique privé des organes indispensables, l’homme a de vagues rudiments de langage