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Page:Ryner - La Sagesse qui rit, 1928.djvu/207

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cune de mes épouses. Je couche avec tous les fantômes de toutes les divinités. Sur chaque fantôme d’univers, j’imprime un instant mon baiser. Mais je possède sans être possédé. Et je ris de mes joyeux incestes. Chaque divinité ou chaque unité que j’épouse est, je le sais, un succube sorti de moi. Dans la pénombre amoureuse du rêve, je ris aux chatouillements de changeantes voluptés. Mais, dès que j’allume ma lumière pour l’action, je vous écarte toutes avec le tonnerre du même rire, ô mes inconsistantes filles épousées. En mes bras, comme aux bras du fantôme Jupiter, Junon reste toujours, je ne l’ignore pas, un nuage. Et mes baisers métaphysiques, j’entends qu’ils demeurent stériles. Si on a l’imprudence de féconder une divinité ou un univers, les enfants qu’on lui fait, je ne l’ignore pas davantage, sont les plus dangereuses des demi-bêtes. Nuée, mon baiser qui joue t’assemble et te disperse ; sa dévotion ne s’attarde jamais assez et ne se prend jamais assez au sérieux pour te permettre de verser sur la terre de l’action les néfastes centaures.