Page:Ryner - La Sagesse qui rit, 1928.djvu/236

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limite du monde ; l’horizon reculera, si j’avance. Le sage n’est plus le naïf qui court vers le ciel. J’ai admiré par quels degrés savants s’affranchit Épicure. J’aime sa distinction entre les besoins naturels et nécessaires comme la faim et la soif, et les besoins artificiels. Les premiers sont limités et généralement faciles à satisfaire. Ma faim, si je l’écoute seule, cesse de crier, après que je lui ai accordé une quantité d’aliments qui n’est pas considérable, et elle se contente des nourritures les plus communes. Ma soif se réjouit à la fontaine ou à la cruche. Les besoins artificiels, au contraire, sont ceux dont nous avons vu fuir les limites et qui, à mesure qu’on tente de les remplir, s’élargissent. Il les faut tuer en leur refusant tout. Mais à quel signe les reconnaître ?

Le besoin naturel et nécessaire a pour premier caractère d’être commun à tous les vivants, de n’avoir rien de social ni même de particulièrement humain. La discipline épicurienne aura donc pour premier résultat de m’affranchir des servitudes humaines, de toutes les folies dont les animaux sont exempts.

Le sage épicurien ne reste pas devant le plaisir l’égal des animaux. Il devient plus libre par un renoncement plus grand. Il discerne bientôt des