Page:Ryner - La Sagesse qui rit, 1928.djvu/240

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Mais, dira-t-on, une telle alchimie est-elle vraiment efficace ?

Certes, puisque Épicure, mourant dans la plus douloureuse des maladies, était parfaitement heureux.

L’expérience personnelle m’apprend que, pour moi, aux combats un peu rudes, cette méthode ne réussit pas toujours. Dans les crises, la discipline stoïcienne s’adapte mieux soit à mon caractère, soit à mes conditions de vie. Il m’est efficace de déclarer choses indifférentes toutes celles qui ne dépendent pas de moi. Indifférentes, les douleurs attachées à la condition humaine. Indifférentes, les privations d’origine sociale. Quand les faire cesser dépendrait peut-être du lâche qui consentirait à plier et à demander grâce, j’ai la fierté de savoir que je suis de ceux dont cela ne dépend point. Je ne parviens pas d’ordinaire à changer la douleur en volupté et à m’écrier avec Épicure : « Quelles délices ! » Je la transmute en orgueil. Je réussis, comme le stoïcien, à repousser l’ennemi ; je ne parviens pas toujours, comme l’épicurien, à le séduire, à le domestiquer, à en faire l’animal familier qui caresse, griffes rentrées.

Certains esprits, sans doute, sont plus capables