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Page:Ryner - La Sagesse qui rit, 1928.djvu/48

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Une morale théologique s’appuie toujours aux contreforts de sanctions extérieures. Elle séduit par des promesses, elle effraie par des menaces : elle ruine mon désintéressement et pèse d’un poids matériel sur ma liberté. Kant veut que j’agisse par devoir, non par crainte ou par espérance. Attitude difficile après que j’ai affirmé des récompenses et des punitions extérieures. D’autre part, cet impératif qui postule l’existence d’un dieu personnel, je ne parviens plus que par d’inquiétantes subtilités à le distinguer de la volonté divine ; mon obéissance au devoir reste le plus souvent servile soumission à un ordre venu de haut. Si Kant veut que, pour être vraiment moral, j’oublie, à l’heure de l’action, Dieu avec sa puissance, mon immortalité avec ses promesses et ses menaces, ne serait-ce pas que le vrai postulat de l’éthique, celui sans lequel s’évanouit toute la beauté de nos gestes, c’est d’écarter les préoccupations d’au delà ?

Les morales religieuses tendent vers une limite où elles cesseraient d’être religieuses et intéressées pour devenir vraiment nobles et sages. Si la terreur de l’enfer et le baveux espoir du paradis sont des moyens de contenir les natures vulgaires, on adresse parfois un autre langage aux âmes supérieures, les seules peut-être qui puissent aspirer à une vie