Page:Ryner - Le Massacre des amazones, Chamuel.djvu/216

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Brada a été couronnée deux fois : pour un roman quelconque, et pour des Notes sur Londres qui sont loin de valoir celles de Mme Daudet. Ne la jugez pas sur les livres qui éblouirent ces pauvres immortels : vous auriez d’elle trop mauvaise opinion, car elle a fait bien mieux, les Lettres d’une Amoureuse. Le commencement m’a enthousiasmé par sa beauté triomphante. J’étais heureux de voir deux êtres « ravis de la joie simple de respirer le même air ». Je jouissais de tout ce qu’il y avait de vie harmonieuse dans les cris de volupté, puis dans les apaisements où la joie et les fleurs « n’exhalaient plus qu’une senteur si atténuée qu’elle ressemblait à un murmure ». Des vibrations violentes m’émouvaient qui, lentement, par nuances jolies, s’amortissaient « en tendresses étouffées et mourantes ». Hélas ! dès la quinzième page, des notes fausses m’irritèrent. Elles m’irritaient d’autant plus que, — je le sentais trop, — elles n’étaient pas là pour elles-mêmes, isolées et oubliables ; mais elles avertissaient de quelque dénoûment banalement sublime et faux. Et, de plus en plus, l’amoureuse Claudia parlait au bien-aimé Luc d’une certaine Irène dont elle n’aurait rien eu à dire s’il n’eût fallu préparer la succession à l’amour. Et voici qu’elle s’oubliait complètement, qu’elle oubliait com-