Page:Ryner - Le Présent du berger, paru dans Le Radical, 17 mai 1914.djvu/14

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— Pour sûr, murmura-t-il, que j’apporterai à ce pauvre petit Jésus le présent du berger.

Il souriait, le remords calmé par cette pensée.

Mais la vieille plaie toujours saignante le faisait souffrir : jamais plus il ne pourrait manœuvrer les rames ou la voile ; jamais plus il ne tirerait de l’eau profonde le filet magnifiquement lourd. Même retrouverait-il ce bonheur dans ses songes ?

Sa pipe finie, il s’endormit à moitié. Et son esprit, un peu engourdi, priait :

— Encore une fois, Seigneur, accorde-moi en rêve la grâce d’une belle pêche.

Il glissait doucement le long de la pente du sommeil. Puis il fut dans le gouffre du sommeil, dans ces profondeurs où, comme aux abysses marins, s’agitent tant de monstres et tant de merveilles.