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Page:Ryner - Le Présent du berger, paru dans Le Radical, 17 mai 1914.djvu/15

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… La Bonne-Mère, au large, voile éployée et vibrante comme une joie. Bernard n’est pas seul sur la barque. À l’arrière, debout, vêtu non d’un costume de marin, mais d’une longue robe blanche aux plis simples et droits, un homme comme on en voit dans les peintures et dans les rêves. Londas, en un tremblement, reconnaît les yeux de puissance et de bonté, la face de douceur et d’amour adoucie encore par l’encadrement des cheveux blonds. C’est Jésus, tel qu’il le voit chaque dimanche dans le tableau qui orne le fond de la vieille église.

Bernard Londas regarde le Christ avec un mélange de bonheur et d’effroi.

Un doigt qui semble fait de lumière approche de son épaule veuve, touche la place où, après l’accident, il fallut couper le bras. Miracle ! l’infirme a ses deux bras. Et le vieillard redevient, fort et hardi, le jeune homme dont il se souvenait à peine.