Page:Ryner - Le Subjectivisme, Gastein-Serge.djvu/37

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pourvu qu’ils regardent tout homme sans haine et sans crainte, ils sont mes égaux, ceux que la Cité menteuse proclame mes inférieurs.

Vos voix se mêlent harmonieusement, fraternisme et subjectivisme. Vous chantez d’accord comme les eaux droites du fleuve et celles qui coulent à gauche.

Jésus, comme Épictète, me veut libre, indépendant, méprisant les biens extérieurs et ceux qui les adorent, Césars ou riches, avec leur valetaille de prêtres, de juges, de soldats, de docteurs, d’orateurs et de poètes. Ce n’est pas à des hommes qu’il veut que j’obéisse ; c’est à un Père que je découvrirai au ciel de mon cœur et qui ne me parlera point par des bouches officielles. Épictète proclame aussi haut que Jésus cette fraternité universelle que les premiers stoïciens appelèrent de son nom le plus glorieux « la vaste charité du genre humain ».

L’un dit plus souvent et plus volontiers : « Aime ». L’autre recommande plutôt : « Sois » ; ou : « Sois toi-même ». Mais leurs sentiments sont semblables, semblables leurs gestes, aussi fort l’héroïsme de leur patience, aussi profonde leur miséricorde pour les bourreaux qui ne savent ce qu’ils font. Qu’importe que, chez l’un, les pensées directrices semblent monter du cœur au cerveau ; que, chez l’autre, elles semblent descendre du cerveau au cœur ?…

Suis-je obligé de choisir entre les deux grandes paroles ? Jésus veut que je me donne. Épictète veut que je me réalise. Se donner est peut-être un moyen de se créer. Se connaître et se réaliser de plus en plus permet de donner mieux et davantage.

La méthode orientale et la méthode grecque se complètent,