Pardonne-moi, Théophile, d’avoir essayé de comprendre. Je reconnais que tu es incompréhensible. Tout à l’heure, un instant, j’ai cru voir en toi un sage. Mais tu es folie et chaos et je fus absurde, devant l’éclair qui a laissé l’orage plus noir, de m’écrier : Voici le soleil !
Tu es absurde de vouloir comprendre Dieu. Il faudrait que tu sois plus grand que lui : le contenant est toujours plus grand que le contenu. L’humilité seule convient devant le mystère.
Je n’ai pas la prétention de comprendre Dieu tout entier. Mais je désire ne prononcer que des paroles que je comprenne.
Ainsi tu ne diras rien qui soit digne de Dieu.
Homme, je ne dis que des paroles humaines, même quand je bégaie les choses divines. Toi, fou ambitieux, tu dis des folies, tu jettes des mots qui retentissent comme des sphères creuses, tu te nourris de fruits dont l’écorce ne contient rien.
Je ne dis rien. Je répète. Je suis incapable de savoir par moi-même quelque chose sur Dieu. Je redis seulement ce que, dans sa bonté infinie, il a bien voulu me révéler de lui.
Ce que Dieu veut révéler de lui, il le révèle à tous les hommes de bonne volonté. Le soleil brille pour quiconque ne ferme pas les yeux. Ainsi l’Ordre du monde pour quiconque ne ferme pas sa raison. Mais Dieu ne joue pas avec les hommes comme un prêtre qui exige qu’on répète des formules vides.