Page:Séances et travaux de l’Académie des sciences morales et politiques, série 2, tome 6.djvu/196

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I.

Parmi les choses qui nous sont utiles, parmi les choses qui sont propres à satisfaire nos divers besoins, et que, dans un sens général et absolu, nous appelons des biens ou des richesses, il y en a qui jouissent d’une utilité directe ; il y en a d’autres qui ne présentent qu’une utilité indirecte, C’est à peine si j’ai besoin de définir ces expressions : elles sont assez claires par elles-mêmes. Il suffit de quelques exemples pour faire comprendre parfaitement la différence qui existe entre ces deux espèces d’utilité. Personne n’ignore qu’un arbre, planté au milieu d’une forêt, n’a, à beaucoup d’égards, qu’une utilité indirecte ; car, si l’on veut en faire des meubles ou du bois à brûler, il faut le couper ou le façonner d’une certaine manière, pour qu’il se prête à l’usage que l’on a en vue. La mine de fer qu’on tire des entrailles de la terre n’a également d’abord qu’une utilité indirecte ; elle doit subir plusieurs opérations avant de nous donner un couteau, un sabre, une clef, une serrure, etc. Ce que nous devons remarquer ici, c’est qu’il est impossible, sous ce rapport comme sous beaucoup d’autres, d’établir, parmi les choses dont nous nous servons, une démarcation tranchée et absolue. L’utilité est essentiellement relative au besoin qu’elle satisfait, à la jouissance qu’elle procure. Il est donc évident que pour savoir et pour décider si une chose est directement ou indirectement utile, il faut avoir égard au besoin qu’elle est appelée à satisfaire, à la jouissance qu’elle doit procurer. On ne peut pas dire, de prime abord, que telle chose a une utilité directe ou indirecte. Mais cela ne doit pas nous empêcher de comprendre que, relativement aux divers besoins que nous éprouvons, et par rapport aux différentes jouissances dont nous sommes susceptibles, il y a des choses d’une utilité plus ou moins directe ou indirecte, c’est-à-dire