Page:Sébillot - Contes de terre et de mer.djvu/60

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— Je suis un homme mort, répondit Jean Cate : je suis meurtri des pieds à la tête.

— Si tu veux me promettre de ne parler à âme qui vive de ce que je vais te faire, je te guérirai.

— Oui, je le jure sur ma vie.

La jeune femme prit dans sa poche une bouteille, et avec l’onguent qu’elle contenait, elle se mit à frotter Jean Cate sur tous les endroits où il avait eu mal. Quand elle eut fini, il se trouva guéri, et aussi dispos qu’avant sa chute :

— Maintenant, lui dit-elle, que la curiosité ne te ramène plus où tu n’as que faire.

Jean Cate pensait bien que la dame était une des fées de la Houle ; il lui dit :

— Comment pourrai-je vous montrer ma reconnaissance ? vous m’avez sauvé la vie.

— Je ne te demande rien, mon ami, rien que le silence sur ce que tu as vu.

— Pourrai-je au moins vous revoir quelquefois ? Dites-moi quel est votre nom.

— Tu le sauras plus tard et tu me reverras ; mais si tu te vantes de ce que tu as vu, tu mourras.

Jean Cate retourna au fort ; il ne parla point à ses camarades de son aventure ; mais il pensait toujours à la jolie dame qui l’avait guéri, et tous les jours, en faisant son service sur les parapets du fort, il regardait du côté de la mer s’il ne l’apercevrait point. Il ne la revit pas, mais souvent il voyait des bonnes femmes, vieilles