Page:Sébillot - Contes de terre et de mer.djvu/93

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— Hé bien ! femme, as-tu trouvé mon pain à ton goût ?

— Oui, Madame, et je vous en remercie de tout mon cœur.

— Il n’a pas duré longtemps, dit la fée.

— C’est vrai ; tous les enfants et les voisins en ont goûté, et il a été vite fini.

— Je vais l’en donner un autre, dit la fée, mais il faudra bien le cacher, dès que tu seras rentrée, afin que personne n’en ait connaissance ; s’il n’y a que ceux de ta maison à en manger, il ne diminuera point et restera toujours frais ; mais prends bien garde d’en couper le moindre morceau pour un étranger, car il disparaîtrait comme celui d’hier. J’ai quatre vaches, et j’ai besoin d’une pâtoure pour les mener aux champs : promets-moi qu’une de tes filles viendra les garder tous les jours, et rien ne te manquera.

— Mais, Madame, lui demanda la femme, où sont vos vaches ? je ne les ai jamais vues. Où l’enfant ira-t-elle les prendre ?

— Elle se rendra tous les matins, à huit heures, dans un champ où elle les gardera toute la journée, et le soir on viendra les chercher.

À partir du lendemain, l’aînée des filles de la veuve, qui avait douze ans, venait tous les matins prendre les vaches des fées ; elles pâturaient, tantôt dans un champ, tantôt dans un autre, et quand les voisins voyaient la petite fille assise une gaule à la main sur l’herbe des forières[1], ou se lever pour crier après son troupeau, ils lui disaient :

— Que fais-tu là, petite ?

  1. Espace non cultivé entre les talus plantés d’arbres et la partie ensemencée des champs.