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Page:Séché - Joachim Du Bellay, 1880.djvu/49

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tine était mariée — chose grave, même en Italie — et son amant n’y avait pas pris garde. Peut-être pensait-il que le mari dont l’âge avait endormi les sens fermerait les yeux sur les infidélités de la belle ; peut-être aussi se trouvait-il assez protégé par la complicité de la mère de Faustine sous les yeux de laquelle ils roucoulaient à leur aise.

Quoi qu’il en soit, le mari jaloux enleva un beau jour Faustine de la maison maternelle et l’enferma en lieu sûr, sans pitié pour l’amoureux qui pendant dix jours rôda comme un renard et gagna, en montant la garde à la porte de sa maîtresse, un affreux rhume de cerveau qui lui donna la fièvre et l’obligea à boire, au lieu de vin, des tisanes adoucissantes[1].

Mais le mari se lassa de jouer le rôle de Cerbère, et ne trouva rien de mieux que de mettre Faustine au couvent. Pendant ce temps-là Joachim du Bellay faisait des neuvaines à Vénus, comme un bon païen qu’il était, pour obtenir la délivrance de sa bien-aimée, et vouait à la déesse des roses, des violettes et deux colombes. C’était plus qu’il n’en fallait pour l’attendrir. Vénus envoya le petit Cupidon vers le cloître avec un passe-partout, et Faustine fut rendue aux caresses de son amant. Voilà l’histoire telle que le poète s’est plu

  1. Me fluens humor cerebro malignus
    Febris atque ardens, et anhela tussis
    Jam decem totis retinet diebus
    Jam dMembra trahentem.
    Non mihi dulcis latices Lyæi,
    Sed sitim sedant medicata nostram
    Pocula
    ...........
                                                          
    Pocula......(Pœmata, fol. 39, 2e).