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Page:Séché - Les Muses françaises, I, 1908.djvu/149

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Sa manière était nouvelle,
Et l’on rencontrait en elle
Je ne sais quel agrément
Qui plaisait infiniment.
Pour avoir plus longtemps le plaisir de l’entendre.
Voyant que, sans l’effaroucher.
Cet agréable oiseau se laissait approcher,
J’avançai la main pour le prendre.
Je le tenais déjà, quand je ne sais quel bruit
Nous effraya tous deux : l’aimable oiseau s’enfuit.
Dans les bois, après lui, j’ai couru transportée ;
Et, par une route écartée.
Je suivais son vol avec soin,
Soit hasard, soit adresse,
Malgré ma délicatesse.
Dieux ! qu’il me fit aller loin !
Enfin, n’en pouvant plus, il se rend, je l’attrape.
Comme j’en avais eu dessein ;
Et, folle que je suis, j’ai si peur qu’il n’échappe.
Que je l’enferme dans mon sein.
O déplorable aventure !
Ce malicieux oiseau.
Qui m’avait semblé si beau.
Change aussitôt de figure.
Devient un affreux serpent ;
Et du venin qu’il répand,
Mon cœur fait sa nourriture.
Aussi, loin de goûter les plaisirs innocents
Dont sa trompeuse voix avait flatté mes sens,
Je souffrais de cruels supplices.
Le traître n’avait plus sa première douceur ;
Et, selon ses divers caprices,
Il troublait ma raison et déchirait mon cœur.
Par des commencements si rudes.
Voyant que les plaisirs que je devais avoir
Se changeaient en inquiétudes,
Renonçant tout d’un coup au chimérique espoir
Dont il voulait me faire une nouvelle amorce.
D'un Dépit plein de fureur
J’empruntai toute la force,
Et j’étouffai l'imposteur.