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Pays-Bas, dès le Moyen âge, les premières manifestations du capitalisme, du capitalisme commercial, fout au moins. Rien ne le montre mieux que les travaux si remarquables du grand historien belge, M. Henri Pirenne.

Au lendemain des invasions normandes, on voit se produire aux Pays-Bas un actif mouvement commercial, qui s’y développe plus tôt que dans la plupart des contrées situées au nord des Alpes. Il est favorisé, en effet, par leur situation géographique, car les Pays-Bas se trouvent au débouché de la vallée du Rhin, l’une des grandes voies naturelles entre la région méditerranéenne et les pays du Nord[1]. C’est alors que se créent des entrepôts de commerce, des portus ou poorts, comme Bruges, Liège, Gand, Bruxelles, Douai, Ypres.

La ville commerçante est « un endroit permanent d’échanges, le centre d’une activité, économique nouvelle ». Elle est peuplée surtout d’immigrants, dont beaucoup sans doute sont fils de serfs. La plupart exercent le métier de marchands (negociatores). Ce sont des aventuriers, des hommes en marge de la société, singulièrement énergiques, avisés et entreprenants, qui, par la piraterie d’abord, puis par des opérations commerciales hardies, accumulent des capitaux. Les marchands du XIIesiècle ne sont pas spécialisés ; ils vendent des marchandises de toutes sortes. La ville n’est aussi pour eux qu’une « base d’opération » ; ils courent de pays en pays et transportent leurs marchandises de place en place. Comme les routes sont peu sûres, ils se groupent en guildes et en hanses, achetant et vendant en commun, se partageant les bénéfices « au prorata de leur mise de

  1. Sur les progrès économiques du nord-ouest de l’Europe, dès le Xe siècle, cf. aussi Paul Kletier, Nordwesteuropa’s Verkher, Handel und Gewerbe, Vienne, 1924.