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Scène VI

Les précédents, le brigadier, suivi d’une grande partie des gens du village ; Valentin veut se lever, le brigadier le fait rasseoir.
Le brigadier.

Reste, mon garçon, reste là. Je t’ai amené tout ce monde, que j’avais prévenu dès hier, pour te complimenter de ta belle conduite le jour où ce gredin de forçat, ton ancien compagnon de chaîne, a voulu me faire sortir de ce monde pour m’éviter les peines de la vie. C’est un gueux ; il est à son poste, au bagne. Toi, tu es un brave homme, un honnête homme, auquel je suis heureux et fier de serrer la main ; tu seras estimé, respecté et aimé de tous, quoique tu aies commis une faute dans ta vie, et que tu aies subi une rude peine pour l’expier. (Se tournant vers la foule.) Croyez-vous, vous autres, que ce soit une petite chose, une pénitence de rien, de passer cinq années au bagne avec un tas de bandits, de scélérats ? Il faut avoir une force et un courage de Samson pour résister à ces canailles et pour y devenir un honnête homme et un bon chrétien. Et je vous dis, moi, qu’un honnête forçat est plus estimable, plus digne de confiance et de respect que le plus honnête d’entre nous, y compris ma brigade composée de la crème des braves, y compris moi qui vous parle. Et celui qui repoussera mon ami, mon sauveur Valentin, qui ne l’honorera pas, qui ne lui portera pas respect, celui-là est un lâche et un sans cœur, et tous