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Page:Ségur - Jean qui grogne et Jean qui rit.djvu/254

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Simon regarda sur son livre, fit son total, et trouva quatre cent vingt francs.

Simon.

C’est singulier ! D’abord comment aurions-nous pu envoyer en deux ans huit cents francs, puisque j’en reçois quatre cents et toi deux cents ? Et nous avons à payer notre entretien, notre blanchissage, les vêtements et les chaussures… Je n’y comprends rien !

Jean.

Je crois que je comprends, moi. C’est notre bon M. Abel… ce doit être lui !… Ceci, par exemple, c’est d’une bonté qui dépasse tout ce qu’il a fait ; y penser, envoyer comme si c’était de notre part et par petites sommes, pour qu’on ne le devine pas ! Mon Dieu, qu’il est bon ! Que je l’aime, que je le bénis !… Et de penser que je ne puis rien faire pour lui montrer ma reconnaissance ! Je ne puis même le lui dire comme je le voudrais ; je n’oserais pas l’embrasser, lui baiser les mains… Quoiqu’il soit bien bon, je n’ose pas.

Simon.

Ce que tu peux faire, mon ami, c’est de prier pour lui, plus encore que tu ne l’as fait jusqu’ici.

Jean.

Je ferai de mon mieux ; mais c’est si peu de chose ! »

Le lendemain, lorsque Jean servit le déjeuner de M. Abel, celui-ci lui trouva un air tout embarrassé.

« Qu’y a-t-il, mon enfant ? lui dit M. Abel ; tu