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L’AUBERGE DE L’ANGE-GARDIEN.

Moutier partit avec Jacques ; en rentrant à l’Ange-Gardien, il raconta à madame Blidot l’histoire de Torchonnet, et lui demanda de permettre à Jacques de faire cette charité de tous les jours.

« Mais, ajouta-t-il, je ne veux pas que vous vous empariez de toutes mes bonnes actions, et je veux payer la nourriture de ce petit malheureux ; vous me direz à combien vous l’estimez et ce dont je vous serai redevable. Je viendrai faire nos comptes une ou deux fois l’an.

MADAME BLIDOT.

Nos comptes ne seront pas longs à faire, monsieur Moutier ; mais, tout de même, je serai bien aise de vous revoir pour que vous veniez inspecter nos enfants et voir si vous les avez mal placés en me les confiant. Tiens, mon petit Jacques, porte cela dans le creux de l’arbre du puits, pour que le pauvre enfant ne se couche pas sans souper. »

Jacques reçut avec bonheur un paquet renfermant du pain et de la viande ; il prit Paul par la main et se dirigea vers le puits que lui indiqua madame Blidot et qui était à cent pas de l’Ange-Gardien. Il plaça son petit paquet dans l’arbre, et, peu de minutes après, il vit le pauvre Torchonnet arriver avec une cruche ; pendant qu’elle se remplissait, Torchonnet saisit le papier, l’ouvrit, mangea avidement une partie des provisions qu’il contenait, remit le reste dans le creux de l’arbre, fit de loin un salut amical à Jacques et repartit, portant péniblement sa cruche pleine.