Page:Ségur - La soeur de Gribouille, Hachette, 1886.djvu/178

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fait à mesure qu’il dit.) Je range proprement les abricots sur la mousse… J’ai les doigts tout poissés ! Cette mousse a bu tout le jus… Les prunes maintenant… Là…, c’est fait… Drôle de compote tout de même !… Tiens ! des fourmis qui étaient dans la mousse et qui se sont noyées dans le jus ! Oh ! comme elles se débattent ! Je les aiderais bien à se sauver, mais j’ai peur qu’elles ne me piquent les doigts. C’est méchant les fourmis ! c’est bête ! ça n’a pas de reconnaissance… Assez regardé. À présent, rangeons les pommes, les poires ! »

Lorsque Gribouille eut fini l’arrangement des fruits, et qu’il eut placé sur diverses assiettes des biscuits, des macarons, des amandes, des noisettes, des croquignoles, des pains d’épice et autres douceurs, il commença à tout disposer sur la table. Enchanté du bon goût et de l’imagination qu’il avait déployés, il regardait la table avec complaisance, tournant autour et s’admirant dans son œuvre. « Il manque quelque chose au milieu, dit-il en s’arrêtant ; il manque quelque chose,… c’est certain,… quelque chose d’un peu haut… Ah ! j’y suis !… » Et Gribouille, courant au perroquet, saisit le perchoir sur lequel dormait son ennemi et le posa sans bruit et sans secousse au beau milieu de la table ! Il reprit de la mousse et entoura le perchoir, de façon à faire une pyramide dont le sommet était Jacquot dormant profondément.

Pour le coup Gribouille se crut un grand homme.

« Jamais, se dit-il, jamais rien de plus beau n’a