Page:Ségur - La soeur de Gribouille, Hachette, 1886.djvu/322

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si belle, si belle, dans une lumière si éclatante ; il y a autour d’elle beaucoup d’anges si jolis ! Et tous m’appellent ; ils arrivent tous près de moi et ils ne peuvent jamais me prendre. Hier, je me débattais pour aller avec eux, mais je ne pouvais pas ; alors un ange tout de feu, que les autres appelaient l’ange de la mort, m’a touché ; vous êtes venu, vous avez coupé les liens qui m’attachaient à la terre, et je me suis envolé avec les anges, qui m’ont porté à maman. J’étais bien content… Et puis,… vous ne savez pas, quand je suis arrivé près de maman, j’ai vu Jacquot qui se sauvait et qui me regardait avec des yeux si furieux ! Les anges le chassaient : c’était drôle ! Il voulait toujours passer et il ne pouvait pas… Je riais, moi, et je me sentais si bien !… oh ! mais si bien, que j’aurais voulu ne jamais m’en aller… Et voilà pourquoi je veux mourir, et je crois que je vais mourir. »

Le brigadier écoutait Gribouille en se caressant la moustache ; tous deux restèrent silencieux et réfléchis.

« C’est singulier !… dit enfin le brigadier à mi-voix. Serait-ce… un avertissement,… un pressentiment ? Pauvre Caroline ! elle ne peut pas rester seule.

gribouille.

N’est-ce pas qu’elle ne peut pas rester seule ? Je vous le disais bien. Il faut que vous ou M. Delmis vous restiez avec elle… Vous me l’avez promis, d’abord.