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Page:Ségur - La soeur de Gribouille, Hachette, 1886.djvu/383

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phrasie.

Une jeune fille comme Caroline ne peut pas rester sous la garde d’un gendarme.

nanon.

Tiens, pourquoi pas ? À quoi c’est-il bon un gendarme, si ce n’est à garder le pauvre monde ?

phrasie.

Mais il est trop jeune, celui-là !

nanon.

Faut-il qu’un gendarme ait cent ans pour faire son service ? Un métier de chien ! courir jour et nuit, par la gelée, par la neige, par la pluie, par le vent, par le soleil, par la poussière ! Passer des nuits immobile comme une borne à guetter des mauvais sujets, qu’on ne prend pas toujours ! Se laisser injurier, assommer, sans seulement rendre une sottise, une gourmade, un coup d’assommoir ! Vous croyez qu’il ne faut pas de force, de santé et de courage pour supporter cet ensemble de dégoûts ? Croyez-vous qu’un gendarme à cheveux blancs ou sans cheveux résisterait à cette vie de triple galère ?

phrasie.

Je ne dis pas ; sans doute, vous avez raison ; mais tout ça ne prouve pas que M. le curé aurait bien fait de laisser Caroline se faire cantinière d’un gendarme.

nanon.

Ma foi, je n’en sais rien ; c’est un état comme un autre, et je ne l’aurais pas sur le dos !