Page:Ségur - Les petites filles modèles.djvu/167

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

bonté me touche profondément, votre pardon est tout ce que je demande. Oh ! madame, j’ai été si méchante, si détestable ! Pourrez-vous me pardonner ?

Madame de Fleurville, l’embrassant.

Du fond du cœur, chère enfant ; crois bien que je ne conserve aucun mauvais sentiment contre toi. Demande pardon au bon Dieu comme tu viens de me demander pardon à moi-même. Je vais t’envoyer à dîner ; tu écriras ensuite ce que je t’avais dit d’écrire et tu achèveras ta soirée en lisant un livre qu’on t’apportera tout à l’heure.

Mme de Fleurville embrassa encore Sophie, qui lui baisait les mains et ne pouvait se détacher d’elle ; elle se dégagea et sortit, sans prendre cette fois la précaution de fermer la porte à clef. Cette preuve de confiance toucha Sophie et augmenta encore son regret d’avoir été si méchante.

« Comment, se dit-elle, ai-je pu me livrer à une telle colère ? Comment ai-je été si méchante avec des amies aussi bonnes que celles que j’ai ici, et si hardie envers une personne aussi douce, aussi tendre que Mme de Fleurville ! Comme elle a été bonne avec moi ! Aussitôt que j’ai témoigné du repentir, elle a repris sa voix douce et son visage si indulgent ; toute sa sévérité a disparu comme par enchantement. Le bon Dieu me pardonnera-t-il aussi facilement ? Oh oui ! car il est la bonté même, et il voit combien je suis affligée de m’être si mal comportée ! »