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Page:Ségur - Les petites filles modèles.djvu/54

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raisin que son oncle avait envoyés de Paris. Quelle privation de ne pas goûter à cet excellent dessert dont elle s’était fait une fête ! Elle continuait donc d’avoir les yeux pleins de larmes.

« Ma pauvre Camille, lui dit Madeleine, tu es donc bien triste de ne pas avoir de dessert ? »

Camille, pleurant.

Cela me fait de la peine de voir tout le monde manger le beau raisin et les belles pêches que mon oncle a envoyés, et de ne pas même y goûter.

Madeleine.

Eh bien, ma chère Camille, je n’en mangerai pas non plus, ni de plat sucré : cela te consolera un peu.

Camille.

Non, ma chère Madeleine, je ne veux pas que tu te prives pour moi ; tu en mangeras, je t’en prie.

Madeleine.

Non, non, Camille, j’y suis décidée. Je n’aurais aucun plaisir à manger de bonnes choses dont tu serais privée.

Camille se jeta dans les bras de Madeleine ; elles s’embrassèrent vingt fois avec la plus vive tendresse. Madeleine demanda à Camille de ne parler à personne de sa résolution.

« Si maman le savait, dit-elle, ou bien elle me forcerait d’en manger, ou bien j’aurais l’air de vouloir la forcer à te pardonner. »

Camille lui promit de n’en pas parler pendant le