Page:Ségur - Lettres d une grand mère.djvu/108

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Malaret, 1871, 5 décembre.

Mon cher et bon petit Jacques, je te remercie de ta lettre, et je suis bien contente que Paul travaille mieux, et j’espère qu’il fera comme toi qui es, dans peu de mois, arrivé à tenir la tête de ta division. Louis de Malaret, qui a commencé par être dans les derniers, a conquis maintenant les meilleures notes et les premières places ; il est rarement au-des- sous de troisième et quatrième ; ses notes sont presque toujours A.-A., ou du moins A. Il va très bien depuis son dernier accès de croup ; c’est aujourd’hui son jour de sortie… Les petits d’A. ont un gouverneur très drôle : sourd comme un pot ; disloqué de tous ses membres ; aux trois quarts fou, en tout ce qui ne regarde pas l’éducation ; ayant une femme folle furieuse qu’on a été obligé d’enfermer dans une maison de fous à Toulouse ; jouant avec ses élèves comme un enfant, malgré ses cinquante ans. Les enfants l’aiment beaucoup et lui obéissent, ce qui est étonnant ; il est vrai qu’ils ont une mère très sévère et qui ne les quitte presque pas. Je t’envoie une lettre du petit Armand qui me donne des détails sur la noce d’Élisabeth…

Tu sais que j’ai un horrible rhume depuis une quinzaine de jours, depuis hier je vais beaucoup mieux ; j’ai bien dormi cette nuit et je ne tousse plus. Il fait de plus en plus froid ; il gèle toutes les nuits ; je crains que Paul et toi vous n’ayez des engelures ; si vous avez perdu vos gants fourrés, écris-le-moi ; je vous en ferai envoyer par le Petit-Saint-Thomas. Louis a encore grandi ; il a grossi, il a bonne mine, il est gai, il parle comme une pie, il mange comme un affamé ; à déjeuner, après un grand plat de saucisses au riz, il a mangé deux membres d’un grand chapon truffé, avec une tapée de truffes excellentes, des légumes, du des-