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carême ; j’en espérais encore une pour le premier mardi d’avril. Adieu, mon cher petit chéri, je t’embrasse bien tendrement.

Grand’mère de Ségur.


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Kermadio, 22 avril 1869.

J’ai reçu ta lettre avec grand plaisir, mon cher petit Jacques ; je suis heureuse de penser à la grande satisfaction que tu éprouves d’être à Livet avec tous les tiens. Tes trois cousins ont lu ta lettre avec admiration, d’abord à cause de ta charmante écriture, ensuite pour ton courage héroïque d’avoir tué l’énorme couleuvre qui aurait, sans toi, dévoré les petits canards. Tu ne m’as pas dit comment tu l’as tuée ; tes trois cousins te demandent instamment de leur faire savoir avec quoi tu l’as tuée et si tu as eu bien peur. Louis vient d’avoir ici une lutte magnifique avec un veau dont il est resté vainqueur. Le veau s’est échappé (un veau d’un an) du côté de la mer ; les vaches le poursuivaient (33 vaches). Louis a couru au secours du veau et des vachères, et ne pouvant faire obéir le veau, il s’est jeté sur lui, l’a saisi par le cou ; il a été emporté à plus d’un quart de lieue,faisant de gré et de force des bonds prodigieux ; enfin, après un quart d’heure de course échevelée, le veau, fatigué et gêné dans sa respiration, s’est arrêté. Louis l’a ramené (pacifiquement cette fois) aux vachères qui étaient restées àmoitié chemin. Le petit Gaston avait poursuivi de loin Louis et le veau ; ils sont revenus haletants, mais triomphants. Je vais bien, sauf les vertiges qui sont à peu près de même qu’à Paris. J’ai trouvé tout le monde en bon état, Gaston [1] engraissé et très frais, Louis [2] grandi et fortifié,

  1. De Malaret.
  2. De Malaret.