Page:Ségur - Lettres d une grand mère.djvu/85

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Kermadio, 1870, 22 décembre.

Cher enfant, je veux te souhaiter la bonne année un peu d’avance, à cause de l’irrégularité de la poste, afin que tu saches, avant de finir cette année désastreuse, combien je pense à toi, combien je t’aime et combien je t’aimerai jusqu’à ma mort et après ma mort. Ta cousine Thérèse m’a écrit que le collège était licencié, mais que les Pères ont obtenu l’insigne faveur de ne pas jeter dehors les enfants dont les parents habitaient les départements envahis par l’ennemi. J’ai bien remercié la bonne Thérèse des détails qu’elle m’a donnés sur toi et sur ta sortie de faveur, et j’ai bien remercié le bon Dieu de t’avoir gardé dans ton excellente école près des bons Pères qui font de leurs élèves des saints ou tout au moins des hommes distingués et chrétiens…..

Nos jeunes soldats se battent comme des lions ; les Bretons sont des modèles de guerriers par leur foi et leur bravoure ; chaque bataillon a ses aumôniers et, avant le combat, ils reçoivent tous à genoux l’absolution sur le champ

de bataille. À Paris, les églises sont pleines de Bretons…..

Moi, je vais bien aussi ; Louis de Malaret travaille un peu mollement ; mais il a de bonnes notes et il continue à être très content. Adieu, mon cher petit chéri, je t’aime et je t’embrasse bien tendrement. Ton oncle Gaston t’embrasse et t’envoie sa bénédiction. Il ne sait pas encore quand il ira à Poitiers ; il ira certainement te voir. Henri sera parti probablement quand tu recevras cette lettre ; ta pauvre cousine sera bien désolée….. Adieu, mon cher enfant ; que le bon Dieu,te bénisse.

Grand’mère de Ségur.

Tout le monde t’embrasse, surtout Élisabeth et Armand.


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