Page:Ségur - Mémoires d’un âne.djvu/130

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ses hommes chercher du renfort pour attaquer les voleurs dans les souterrains, et emmener garrottés, dans une charrette, les six voleurs déjà faits prisonniers. Les gendarmes qui restèrent eurent ordre de se partager en deux bandes, pour surveiller les sorties du couvent ; moi, on me laissa à mon idée, après m’avoir bien caressé et m’avoir fait les plus grands compliments sur ma conduite.

« S’il n’était pas un âne, dit un gendarme, il mériterait la croix.

— N’en a-t-il pas une sur le dos ? dit un autre.

— Tais-toi, mauvais plaisant, dit un troisième ; tu sais bien que cette croix-là est marquée sur les ânes pour rappeler qu’un des leurs a eu l’honneur d’être monté par Notre-Seigneur Jésus-Christ.

— Voilà pourquoi c’est une croix d’honneur, reprit l’autre.

— Silence ! dit l’officier à voix basse : Cadichon dresse les oreilles. »

J’entendis en effet un bruit extraordinaire du côté de l’arche ; ce n’était pas un bruit de pas, on aurait dit plutôt comme un craquement et des cris étouffés. Les gendarmes entendaient bien aussi, mais sans pouvoir deviner ce que c’était. Enfin, une fumée épaisse s’échappa de plusieurs soupiraux et fenêtres basses du couvent, puis quelques flammes jaillirent : quelques instants après tout était en feu.

« Ils ont mis le feu dans les caves pour s’échapper par les portes, dit l’officier.