Page:Ségur - Mémoires d’un âne.djvu/217

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Jacques.

Non, puisque nous partirons longtemps avant vous. »

Comme ils finissaient de parler, on m’amena tout sellé et tout pomponné ; les papas étaient prêts ; ils placèrent les petits garçons sur mon dos, et je partis doucement, pour ne pas faire courir les pauvres papas.

Une heure après, nous arrivions au champ de foire ; il y avait déjà beaucoup de monde près du cercle indiqué par une corde, où l’âne savant devait montrer son savoir-faire. Les papas de mes petits amis les firent placer avec moi tout près de la corde. Mes autres maîtres et maîtresses nous rejoignirent bientôt et se placèrent près de nous.

Un roulement de tambour annonça que mon savant confrère allait paraître. Tous les yeux étaient fixés sur la barrière ; elle s’ouvrit enfin, et l’âne savant parut. Il était maigre, chétif ; il avait l’air triste et malheureux. Son maître l’appela ; il approcha sans empressement, et même avec un air de crainte ; je vis d’après cela que le pauvre animal avait été bien battu pour apprendre ce qu’il savait.

« Messieurs et mesdames, dit le maître, j’ai l’honneur de vous présenter Mirliflore, le prince des ânes. Cet âne, messieurs, mesdames, n’est pas si âne que ses confrères ; c’est un âne savant, plus savant que beaucoup d’entre vous : c’est l’âne par excellence, qui n’a pas son pareil. Allons, Mirliflore, montrez ce que vous savez faire ; et d’abord