Page:Ségur - Mémoires d’un âne.djvu/378

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

La grand’mère.

Pourquoi veux-tu que Cadichon t’aime plus que les autres, mon petit Jacques ? Ce n’est pas juste.

Jacques.

Si fait, grand’mère, c’est juste, parce que je l’aime plus que ne l’aiment mes cousins et cousines, et que lorsqu’il a été méchant, que personne ne l’aimait, moi, je l’aimais encore un peu… et même beaucoup, ajouta-t-il en riant. N’est-il pas vrai, Cadichon ? »

Je vins aussitôt appuyer ma tête sur son épaule. Tout le monde se mit à rire, et Jacques continua :

« N’est-ce pas, mes cousines et cousins, que vous voulez bien que Cadichon m’aime plus que vous ?

— Oui, oui, oui, répondirent-ils tous en riant.

Jacques.

Et n’est-ce pas que j’aime Cadichon, et que je l’ai toujours aimé plus que vous ne l’aimez ?

— Oui, oui, oui, reprirent-ils tout d’une voix.

Jacques.

Vous voyez bien, grand’mère, que, puisque c’est moi qui vous ai amené Cadichon, puisque c’est moi qui l’aime le plus, il est juste que ce soit moi que Cadichon aime le mieux.

La grand’mère, souriant.

Je ne demande pas mieux, cher enfant ; mais quand tu n’y seras pas, tu ne pourras plus le soigner.

Jacques, avec vivacité.

Mais j’y serai toujours, grand’mère.