Page:Ségur - Nouveaux contes de fées.djvu/51

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ingratitude, la mort de tes amis ? Va-t’en ; n’insulte pas à leur mémoire par ta présence.

— Ah ! s’écria Blondine, mes pauvres amis, Bonne-Biche, Beau-Minon, que ne puis-je expier par ma mort les malheurs que j’ai causés ! »

Et elle se laissa tomber, en sanglotant, sur les pierres et les chardons ; l’excès de sa douleur l’empêcha de sentir les pointes aiguës des pierres et les piqûres des chardons. Elle pleura longtemps, longtemps ; enfin elle se leva et regarda autour d’elle pour tâcher de découvrir un abri où elle pourrait se réfugier ; elle ne vit rien que des pierres et des ronces.

« Eh bien, dit-elle, qu’importe qu’une bête féroce me déchire ou que je meure de faim et de douleur, pourvu que j’expire ici sur le tombeau de Bonne-Biche et de Beau-Minon ? »

Comme elle finissait ces mots, elle entendit une voix qui disait : « Le repentir peut racheter bien des fautes. »

Elle leva la tête, et ne vit qu’un gros Corbeau noir qui voltigeait au-dessus d’elle.

« Hélas ! dit-elle, mon repentir, quelque amer qu’il soit, rendra-t-il la vie à Bonne-Biche et à Beau-Minon ?

— Courage, Blondine, reprit la voix ; rachète ta faute par ton repentir ; ne te laisse pas abattre par la douleur. »

La pauvre Blondine se leva et s’éloigna de ce lieu de désolation : elle suivit un petit sentier qui la mena dans une partie de la forêt où les grands