Page:Ségur - Quel amour d’enfant.djvu/302

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aucune impression. Je veux te garder. Tu es ma fille unique ; la vie nous est trop pénible sans toi : ta pauvre mère le trouve comme moi. Elle…

giselle, s’animant.

Ce n’est pas possible. Maman est beaucoup plus courageuse que vous ; elle m’aime plus sagement que vous. Elle cherche mon véritable bien, et je suis sûre que si maman était seule, sans vous, elle me laisserait rentrer au couvent.

m. de gerville.

Tu as, en effet, joliment gagné au couvent. Tu me dis autant d’impertinences que de mots. Tu témoignes une crainte de vivre avec nous qui prouve non seulement une indifférence complète, mais une aversion inexplicable, à laquelle je ne veux pas céder et que je veux vaincre par la force.

giselle, se contenant.

Je n’ai pas d’aversion ni d’indifférence pour vous, papa, au contraire ; mais je vous crains. Je crains votre faiblesse, je crains la mienne ; je sens le mal que vous me faites, et je veux prendre des forces contre vous. Je sens que je suis encore trop jeune pour vivre sans direction. Je n’ai pas d’amis, je n’ai que des esclaves. Là-bas, j’ai des maîtresses qui savent me diriger, des compagnes qui ne craignent pas de me contrarier et de me faire céder.