en voyant mourir un tel fils et pleurer cette mère, faites silence comme eux, bénissez Dieu comme eux, au lieu de l’accuser, et cessez de juger des choses et des âmes chrétiennes avec les pensées de la terre ! Les chrétiens ne sont pas les citoyens du temps, mais de l’éternité, et c’est à la mesure de l’éternité qu’il faut juger de leurs joies et de leurs douleurs.
En se plaçant à ce point de vue, le seul vrai, le seul immuable, pour juger la vie et la mort de notre héros, tout change d’aspect, la miséricorde du bon Dieu apparaît dans ce qui semblait d’abord l’excès de sa justice, et les desseins de cette miséricorde infinie sur Hélion de Villeneuve se manifestent avec une évidente clarté. Cet enfant était né avec des grâces particulières ; l’esprit divin, qui souffle où il veut, l’avait visité dès son berceau ; il était évidemment un fils d’élection, et toute son enfance fut comme enveloppée dans l’amour gratuit et surnaturel de Dieu. Pour accomplir la destinée que Dieu lui avait réservée, pour arriver à cette éternité de bonheur et d’amour qui l’attendait au ciel, et dont les merveilles de son enfance avaient été les prémices et le gage ; en un mot, pour prendre de prime abord possession de ce beau ciel où rien n’entre qui ne soit parfaitement pur, il fallait que son âme fût passée comme l’or au creuset de la douleur, et que son front fût marqué de ce caractère de la souffrance qui n’a manqué à aucun des bien-aimés du Seigneur. Dès lors tout s’explique admirablement et sa vocation tardive, et cette sorte d’instinct irrésistible qui le pousse de résolution en résolution et de régiment en régiment jusqu’à la tranchée où l’attend la mort, et sa fin prématurée avec toutes ses souffrances physiques et morales. Son sacrifice a été accepté, parce que Dieu n’accepte les sacrifices que de ceux qu’il aime ; il a été sanglant et douloureux, parce que les chrétiens,