Page:Ségur - Un bon petit diable.djvu/288

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tant quelque accident, la suivait toujours de loin et ne la perdait pas de vue ; il l’emmenait dans les champs, dans les prés, dans un joli bois qui avoisinait la ferme. Juliette se sentait heureuse de respirer l’air pur de la campagne ; cette vie calme et uniforme allait si bien à son infirmité, et elle se trouvait si contente au milieu de cet entourage gai, animé, occupé ! Charles bénissait la cousine Mac’Miche, qui, sans le vouloir, avait tant contribué à son bonheur et à celui de Juliette et de Marianne ; Betty et Donald ne cessaient de vanter leur bonheur ; on les entendait chanter et rire tout le long du jour.

Le chat seul ne prenait aucune part à cette satisfaction générale ; il passait, seul et triste, une grande partie de ses journées dans la maison du bourg, cherchant ses maîtresses absentes, et heureux de revoir à la fin du jour son persécuteur Charles, dont l’amitié lui était sans cesse fatale. Un matin, Betty avait préparé de la pâte pour faire des nouilles ; Charles ne les aimait pas, ce qui lui avait déjà valu des reproches de Marianne.

« C’est une mauvaise habitude, Charles, lui disait-elle, de ne pas manger de certains mets : il faut tâcher d’aimer tout et de manger de tout. »

Lors donc que Charles vit cette pâte qui s’étalait sur un plat comme pour le narguer, il résolut de s’en défaire ; mais comment la faire disparaître ? Minet, qui rôdait autour de ce plat et qui semblait désirer vivement y arriver, lui parut un excellent complice ; il l’appela, le caressa, l’em-